MY WEEK WITH AUDREY – DAY 1. MONDAY. « Roman Holliday » (1953)
MY WEEK WITH AUDREY – DAY 1.
MONDAY.
« ROMAN HOLLIDAY » (1953)
PITCH. La toute jeune Princesse
Ann fait le tour des capitales d’Europe dans un voyage diplomatique. Alors
qu’elle est à Rome, le protocole, ses responsabilités et son emploi du temps
surchargé de mondanités ennuyeuses à crever la mettent au bord de la crise de
nerfs. Sur un coup de tête, elle décide de faire le mur et de fuguer. Mais la
promenade nocturne est de courte durée puisqu’elle est sous l’effet des
calmants que son médecin royal lui a administré. La jeune princesse est
retrouvée endormie sur un banc en face du Forum par le journaliste qui est très
exactement censé l’interviewer le lendemain même. Ne la reconnaissant pas, il finit
par emmener la demoiselle chez lui pour qu’elle s’y repose. Le lendemain, le
journaliste réalise l’identité de sa mystérieuse invitée, et décide aussitôt de
d’exploiter la situation pour faire un max de photos et décrocher un scoop
juteux avec l’aide d’un complice photographe. Justement, cela tombe bien :
pas du tout impatiente de retrouver sa vie de château, la jeune princesse est
bien décidée à profiter de sa liberté pour découvrir Rome et ses
merveilles ! Le couple s’embarque alors dans une aventure où ce qui devait
être un petit piège médiatique se transforme peu à peu en authentique romance…
COMMENTAIRE. Il s’agit ici du
premier rôle principal d’Audrey Hepburn. Elle a alors 23 ans. Elle décrochera
ainsi son premier Oscar, qui sera malheureusement son dernier, malgré de
nombreuses nominations tout au long de sa glorieuse carrière et un succès
incontestable.
Ce film me prend par les
sentiments, car il réunit deux de mes amours : Rome et Audrey. Voir la
jeune femme traverser tous ces décors qui me sont familiers et représentent
tant pour moi, cela a une saveur toute particulière, même si cette dimension
reste soumise à deux réserve : les scènes sont courtes, et les lieux
antiques sont assez en retrait (hors, ce sont les seuls qui m’intéressent
vraiment), et ensuite, sans que je sache s’il s’agit d’un choix artistique ou
d’une contrainte financière, le film est en noir et blanc. Un atout de charme
pour bien des intrigues, auxquelles cela ajoute beaucoup d’élégance et de
glamour. Mais ici, on est assez frustrés de visiter en noir et blanc une ville
aussi somptueuse et colorée que Rome.
Là où le film tient toutes ses
promesses et annonce bien la carrière à suivre d’Audrey, c’est dans la
dimension positive, lumineuse, le mélange de romance et d’humour, et l’aspect
feel-good qui en ressort. On est face à une véritable version
« junior » du type de productions dans lequel l’actrice s’illustrera
dans un registre bien à elle, délicieusement chaleureux. Le film est drôle,
léger, enjoué, d’une candeur rafraichissante, et cela dès ses premières
minutes, et jusqu’à la fin tout en finesse et très juste dans le doux/amer.
En fait, on a l’impression d’être
devant un véritable film live « Disney » bien avant l’heure (la
Touchtone créée dans les années 80), dans une sorte de prototype inversé du
très sympathique « Princesse malgré elle » de Gary Marschall
(réalisateur de « Pretty Woman »), produit pour Disney, et qui vit de
la même façon la révélation au grand public d’Ann Hathaway. Ici, avec Ann (!)
interprétée par Audrey Hepburn, on a bien affaire à une princesse malgré elle,
qui voudrait juste profiter de la vie comme l’adolescente qu’elle est encore.
Car c’est une Audrey vraiment très jeune à laquelle on a affaire, pas tout à
fait mure, ses traits juvéniles renforçant cette impression (car on a bien
affaire à une jeune femme de 23 ans, bientôt mariée, et non à une adolescente,
en réalité !). Cela tient peut-être à son jeu tout en candeur et en
espièglerie.
Son jeu, justement, jette de
façon incroyable toutes les bases de ce qu’il sera amené à devenir au fil des
20 des 15 années de carrières qui suivront. On sent que tout est déjà là, et va
pouvoir mâturer, être affiné, se perfectionner au fil des rôles pour créer
« Audrey » telle qu’on s’en souvient.
Toujours dans la filiation à
l’esprit Disney, il y a de façon plus évidente le parallèle avec
« Cendrillon », qui est suggéré avec insistance dans le film à
plusieurs reprises, jusqu’à la fin où il est carrément nommé par Ann. Mais
l’allusion la plus savoureuse, on l’a dès la toute première scène du film, qui
est peut-être restée ma préférée de toutes. On y voit Ann dans sa somptueuse
robe de cérémonie, se prêter avec un entrain tout relatif à ses fonctions en
saluant un à un les convives d’un gala devant son trôle. Alors que la scène
aurait tout pour nous communiquer l’ennui de la princesse, on vit soudain un
moment absolument insolite qui en dit long sur sa personnalité tout en nous
régalant de tendresse et d’amusement mêlés (la fameuse recette Audrey qui me
charme tant !). En effet, voilà que la caméra passe tout bonnement sous la
robe de la princesse, et nous montre ses pieds impatientés s’échapper de leurs
souliers pour gratter ses mollets ou taper du talon sur le sol. Absolument
craquant ! Et cela devient carrément hilarant en plus d’être mignon, quand
– arrive ce qui devait arriver – la demoiselle ne parvient plus à retrouver son
soulier et le cherche à tâtons du bout de ses orteils, en vain. Cendrillon
perdait son soulier en courant ; voilà une princesse qui perd sous soulier
en faisant du surplace et en voulant se gratter le mollet discrètement !
Petite scène de gêne amusante quand le soulier orphelin est aperçu par la suite
royale et rapidement restitué en toute discrétion. Le film avait à peine
commencé, et Audrey m’avait déjà arraché ce premier mélange de rire et d’attendrissement.
Est-ce dû à sa forte présence,
son charisme et son talent ? Ou bien serait-ce que je ne suis pas très
partageur ? Mais en tout cas, dans ce film, ce que j’ai de loin préféré,
ce sont les scènes qu’Audrey fait toute seule : la scène du soulier
perdu ; la scène d’évasion du palais dans la camionnette lorsqu’elle salue
les passants ; sa traversée du marché où elle s’offre de jolies spartiates
pour laisser enfin ses pieds respirer ; sa scène chez le coiffeur où elle
fait ce geste symbolique de couper ses cheveux de petite fille et devient une
ravissante jeune femme émancipée sous nos yeux (la beauté du visage
d’Audrey est telle que les cheveux courts et l’absence totale de maquillage la
magnifient plus encore – le paroxysme est atteint quand, en plus, elle sera
complètement trempée après son saut dans le Tibre. Là encore, les cheveux
mouillés est un autre grand « test » fameux pour attester de
l’invincible beauté d’un individu !) ; sa glace Plazza Di Spagna. Ce sont
clairement les scènes qui surnagent du film, pour moi, dans leur charme et leur
simplicité, mettant parfaitement en avant le personnage et la liberté qu’il
s’agit d’illustrer chez elle.
Non pas que le personnage du
journaliste incarné par Gregory Peck soit spécialement antipathique ou raté. Il
assure son rôle de gentleman malicieux, évoluant du chasseur de scoop intéressé
et doucement manipulateur à l’homme de plus en plus charmé et carrément
amoureux sur la fin. Les scènes avec son collègue photographe, Irving, sont
particulièrement drôles, d’autant plus que l’interprète de ce dernier a
vraiment une excellente tête et un très bon capital sympathie/comique. Il y a
même des scènes très jolies et même cultes avec le « couple », comme
la fameuse scène de traversée de la ville en vespa, le malicieuse scène de la
« bouche de la vérité » ou encore la scène de danse puis de pugilat
sur le Tibre. Mais pour moi, le film aurait limite pu tenir uniquement sur
Audrey, tellement elle peuple les scènes à elle seule et assure complètement le
spectacle.
Il y a en outre un
« souci » qui est amené à se reproduire tout au long de la
filmographie de l’actrice et cela parce qu’il est clairement un phénomène
d’époque : la différence d’âge entre les deux acteurs principaux (23 ans
pour Audrey, 37 ans pour Gregory Peck, qui en fait une quarantaine
d’aujourd’hui). Cela n’est absolument pas une question pour moi lorsqu’il
s’agit d’amour et de sentiments, mais sur un plan purement esthétique, dans une
œuvre d’art, cela peut être une autre affaire. Surtout quand cela ne se
justifie pas, et que ce schémas se reproduit à l’infini dans toutes les
productions de ces époques ; probablement parce qu’alors, il était
considéré comme « esthétique » et glamour de montrer ces jeunes
femmes toutes « fraiches » dans les bras d’hommes d’âge plus mur. Cela
ne renvoie pas toujours la meilleure émotion et ne participe pas forcément à la
crédibilité des couples. Mais bon, c’est une autre époque ! Et clairement,
un petit minet de la vingtaine n’aurait guère été un choix plus heureux. C’est
un profile comme on n’en fait pas à l’époque qui m’aurait semblé le choix le
plus judicieux, mais ces questionnements sont clairement anachroniques. La
complicité entre les deux acteurs est manifeste et attesté, c’est ce qui
compte, et suffit largement à se laisser convaincre et séduire par leur romance
très innocente.
Parmi les scènes insolites et
savoureuses, il y a ce moment de goujaterie absolument digne d’Hubert
Bonnisseur de la Bath dans « OSS 117 », lorsque Gregory Peck,
trouvant Ann endormie dans son lit, la vire littéralement pour la balancer sur
le sofa comme un vulgaire sac à patate. L’effet est ouvertement comique et
n’appelle donc aucun commentaire autre qu’amusé, mais il est vrai que la
muflerie de la scène hallucine et indigne presque malgré tout ! S’il ne
laisse pas son lit à la princesse par élémentaires savoir vivre et galanterie,
qu’il le fasse au moins pour s’assurer de douces nuits à venir et porter chance
à ses rêves à venir ! Audrey dans son lit, bon sang ; nul doute que
les draps s’en souviendraient !
Je m’étonne presque d’avoir déjà
tant écrit sur ce film (même venant de moi), car si je l’ai beaucoup apprécié
et qu’il a tenu ses promesses dans l’ensemble, j’ai bien eu conscience en le
voyant que l’on « pouvait mieux faire », ce que je sais déjà de par
les 2 films de la sélection que j’ai déjà vus. Le film est la bouffée d’air
frais glamour et candide que je m’attendais à voir, mais nul doute que les
chefs d’œuvre sont encore à venir pour Audrey, et que l’Oscar quasi-inaugural
de sa carrière est un Oscar d’encouragement et d’anticipation sur une suite qui
promet, et dans laquelle j’ai déjà hâte de me plonger.
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